Une tribune pour les luttes

Margaret Thatcher

Elle est morte et nous ne la regretterons pas.
Chantre de l’ultralibéralisme, elle est aussi celle qui a refusé jusqu’à leur mort un statut politique aux membres de l’IRA en grève de la faim.

Bobby Sands avait vingt-sept ans. Après lui moururent neuf autres prisonniers politiques qui, à son exemple, menèrent jusqu’au bout leur mouvement de revendication.
Voir aussi son comportement avec les mineurs, "les ennemis de l’intérieur" (Trois morts, 20 000 blessés...) et les lois d’interdictions des grèves...

Article mis en ligne le lundi 8 avril 2013

Il y a trente ans deux ans, le 5 mai 1981, au terme de soixante-six jours de grève de la faim, mourait Bobby Sands, en Irlande du Nord, dans la prison de Maze surnommée Long Kesh par les républicains.

Bobby Sands avait vingt-sept ans. Après lui, dans les jours qui suivirent, moururent neuf autres prisonniers politiques qui, à son exemple, menèrent jusqu’au bout leur grève de la faim pour obtenir le statut de prisonnier politique .

Les 10 prisonniers politiques irlandais morts de faim, dont Bobby Sands

Cliquez pour agrandir

Bobby Sands (IRA), 27 ans, meurt le 5 mai 1981 après 66 jours de grève de la faim
Francis Hughues (IRA), 25 ans, meurt le 12 mai 1981 après 59 jours de grève de la faim
Raymond McCreesh (IRA), 24 ans, meurt le 21 mai 1981 après 61 jours de grève de la faim
Patsy O’Hara (INLA), 23 ans, meurt le 21 mai 1981 après 61 jours de grève de la faim
Joe McDonnell (IRA), 30 ans, meurt le 8 juillet 1981 après 61 jours de grève de la faim
Martin Hurson (IRA), 29 ans, meurt le 12 juillet 1981 après 46 jours de grève de la faim
_ Kevin Lynch (INLA), 25 ans, meurt le 1er août 1981 après 71 jours de grève de la faim
Kieran Doherty (IRA), 25 ans, meurt le 2 août 1981 après 73 jours grève de la faim
Thomas McElvee (IRA), 23 ans, meurt le 8 août 1981 après 62 jours grève de la faim
Michael Devine (INLA), 27 ans, meurt le 20 août 1981 après 60 jours de grève de la faim

Originaire d’une famille modeste , Bobby Sands avait quitté l’école tôt pour faire un apprentissage en carrosserie. « J’étais seulement un enfant de la classe ouvrière d’un ghetto nationaliste, écrit-il dans l’un de ses textes de prison. Mais c’est la répression qui a fait naître en moi l’esprit révolutionnaire de liberté. » .En 1972, sa famille est expulsée du quartier par les protestants. il a dix-huit ans et rejoint l’IRA provisoire. En 1976, il est arrêté après une fusillade avec la police royale d’Ulster et condamné à quatorze ans de prison

Contexte : la question du statut spécial

Le 1er mars 1976, un décret du gouvernement travailliste de James Callaghan abroge le statut spécial d’incarcération, favorable, créé en 1972 pour les prisonniers républicains nord-irlandais. Tous les membres de l’IRA et autres groupes républicains internés au Maze perdent ce statut spécial, dit de prisonniers politiques et sont considérés comme des criminels et délinquants de droit commun. Cette décision provoque la colère des détenus et donnera naissance à de multiples protestations.

La Blanket protest

Le premier prisonnier à réagir s’appelle Kieran Nugent : il refuse de porter l’uniforme de la prison car il ne se considère pas comme un criminel (avant le changement de règlement, les prisonniers politiques pouvaient porter leurs propres vêtements). Les autres détenus soutiennent son initiative et certains décident également d’être nus ou de ne porter qu’une couverture plutôt qu’un uniforme carcéral. Cette protestation, appelée Blankets protest (en français : Grève des couvertures), durera jusqu’en 1978. 300 prisonniers sont ainsi nommés "blanket men" car ils sont vêtus de couvertures.

La Dirty protest

Suite au peu d’impact médiatique de cette protestation et aux conditions de détention effroyables à Long Kesh (passages à tabac, mauvais traitements, tortures...), les détenus décident de passer au niveau supérieur et lancent la Dirty protest (ou No-wash protest) en mars 1978 (en français : Grève de l’hygiène).

Les prisonniers refusent de se laver. Ils demandent aux autorités d’accéder à 5 demandes :
- 1.Le droit de ne pas porter l’uniforme de prisonnier ;
- 2.Le droit à ne pas participer aux travaux de prisonnier ;
- 3.Le droit de libre association avec d’autres prisonniers et celui d’organiser des activités éducatives ou récréatives ;
- 4.Le droit à une visite, une lettre et un colis par semaine ;
- 5.L’entière restauration de la remise de peine perdue lors de la protestation.

Un matin de 1978, alors que des centaines de républicains vivent nus depuis deux ans, les Britanniques décident de confisquer leurs tinettes. Sands et les autres urinent sur le sol et répandent leurs excréments sur les murs des cellules. Les douches leur sont interdites. Ils sont lavés au jet.

Ils persévèrent dans leur combat pendant 5 ans. Les gardiens sont très cruels avec les détenus et leur infligent en vain sévices après sévices pour qu’ils abandonnent la "Protest". Les conditions à Long Kesh sont alors inhumaines : cellules sales, humides et froides ; les vitres des fenêtres sont cassées et il pleut ou neige sur les prisonniers ; l’hiver, il fait tellement froid que les détenus ne peuvent pas dormir : ils étalent quelques mouchoirs sur le sol pour "atténuer" la température glacée du sol ; la nourriture servie est avariée et insuffisante ; les prisonniers se font régulièrement tabasser par leurs gardiens... Mais malgré tout cela, ils tiennent bon et continuent la protestation.

Grève de la faim des détenus

En mars 1981, cela fait cinq ans que les hommes sont nus, et trois années qu’ils vivent dans leurs excréments. Les détenus décident d’un moyen plus radical pour attirer l’attention du public sur leur situation : le 27 octobre, 7 d’entre eux entament une grève de la faim, interrompue après 53 jours, suite à un accord ambigu : les prisonniers obtiennent le droit de porter des habits civils mais pas leurs propres habits.

L’accord consécutif à la première grève de la faim ne tient pas. Bobby Sands refuse de s’alimenter le 1er mars 1981 et entame ainsi sa grève de la faim. L’organisation prévoit cette fois un début progressif des grèves de la faim afin de faire un maximum de publicité à leur mouvement avec un étalement de la détérioration physique voire de la mort des prisonniers sur plusieurs mois

Élection

Peu de temps après le début de cette grève de la faim, un député républicain du Fermanagh et du sud Tyrone meurt et des élections anticipées sont provoquées. La vacance soudaine de ce siège obtenu avec une faible majorité catholique est l’opportunité pour les supporters de Sands et de son combat d’accroitre la pression contre le gouvernement. Ils proposent donc Sands comme candidat à l’élection législative anticipée. Après une campagne électorale fortement médiatisée, Sands remporte le siège le 9 avril 1981 par 30 492 votes contre 29 046 au candidat de l’Ulster Unionist Party, Harry West.

Le gouvernement change la loi électorale en introduisant le Representation of the People Act pour prévenir l’élection d’autres prisonniers de l’IRA. Cette loi interdit aux prisonniers condamnés à plus d’un an de prison de se présenter à des élections.

Thatcher continuant à faire la sourde oreille, les prisonniers politiques décidèrent alors d’engager les uns après les autres la grève de la faim de telle manière que, si l’un d’entre eux mourait, le relais soit pris par ses camarades. Mais la « Dame de fer » refusa de se laisser fléchir…

Mort de Bobby Sands

Le 5 mai 1981, Bobby Sands meurt à l’hôpital de la prison après 66 jours de grève de la faim. L’annonce de sa mort provoqua de nombreuses émeutes dans les quartiers nationalistes en Irlande du Nord. Deux personnes trouveront la mort à cette occasion (un laitier et son fils). Plus de 100 000 personnes suivirent le cortège lors de ses funérailles.

L’intransigeance dont fit preuve madame Thatcher pendant la grève de la faim et le cynisme qu’elle exprima ensuite (« Il a choisi de s’ôter la vie, a-t-elle déclaré. C’est un choix que son organisation ne laisse pas à beaucoup de ses victimes. ») ne furent pas pour rien dans l’émotion qui suivit sa mort.
Au-delà, la position du gouvernement britannique a également choqué nombre de nationalistes s’opposant à l’IRA.

En plus de Bobby Sands, six autres membres de l’IRA et trois de l’INLA moururent des suites de la grève de la faim. L’image de Bobby auprès de la plupart des républicains irlandais et des sympathisants du groupe terroriste est celle d’un martyr, étant resté ferme face à l’intransigeance du gouvernement de Margaret Thatcher.

Dans les mois qui ont suivi l’agonie puis la mort de Bobby Sands et de ses compagnons, de par sa couverture médiatique, l’IRA a vu les dons et le nombre de ses membres augmenter sensiblement, et une nouvelle vague de violence remarquable par le durcissement des positions tant des nationalistes que des unionistes.

Durant toute la durée de son internement, Bobby écrivit des textes, des lettres, des poèmes... qui furent régulièrement publiés dans le journal républicain An Phoblacht. Les livres le plus connus sont One Day in my life ("Un jour dans ma vie", il existe une parution traduite en français) : Bobby y décrit le déroulement d’une journée normale en prison, et Writing from Prison : un recueil de textes écrits secrètement en prison.

Sources Wikipedia


Margaret Thatcher et les mineurs qu’elle avait accusés pendant leur grève d’un an d’être "les ennemis de l’intérieur".

Trois morts, 20 000 blessés ; 11 300 manifestants ont été arrêtés et plus de 200 traduits en justice

Pour casser la grande grève des mineurs britanniques de 1984-1985, elle décide :

de réduire au maximum de l’emploi du charbon dans les centrales en se servant des ressources d’appoint comme le pétrole ;

du recours aux forces policières pour empêcher la formation de piquets de grève (en bloquant par exemple les routes) mais aussi de faire face aux manifestations et escorter les non-grévistes vers leur lieu de travail, parfois même en fourgon blindé ; le conflit fera trois morts, 20 000 blessés ; 11 300 manifestants ont été arrêtés et plus de 200 traduits en justice ;

de limiter les aides sociales aux familles des grévistes ;

du vote d’une loi empêchant les travailleurs non-mineurs de soutenir les grévistes mineurs et rendant nul le fait de faire des piquets de grève (non pas en les interdisant mais en obligeant les piquets à « se placer là où ils gênent le passage de personne »).

LONDRES "C’est un jour merveilleux. Je suis ravi", a confié lundi à l’AFP David Hopper, responsable régional du syndicat des mineurs (NUM) dans le nord-est de l’Angleterre, en réaction à l’annonce du décès de Margaret Thatcher.

"Je bois un verre en ce moment précis. C’est un jour merveilleux. Je suis ravi. C’est mon 70e anniversaire aujourd’hui et c’est l’un des meilleurs de ma vie", s’est félicité le responsable du syndicat des mineurs (NUM).

"Thatcher a fait plus de mal dans le nord-est que qui que ce soit d’autre. Il ne s’agit pas seulement des mines de charbon. Elle a entrepris de détruire les syndicats. Elle a décimé l’industrie, détruit nos communautés", a-t-il fulminé. "L’Angleterre importe maintenant 40 millions de tonnes de charbon chaque année. C’est absolument scandaleux".

"Nous essayons d’organiser une fête tous ensemble le jour de ses funérailles. Il n’y aura pas beaucoup de larmes qui vont couler pour elle par ici. Je ne pense pas non plus que beaucoup regarderont les funérailles à la télé, ils regarderont sans doute du foot", a-t-il ajouté.

Depuis 1985, près de 230.000 mineurs ont perdu leur travail et 165 mines ont été fermées par le gouvernement conservateur de Margaret Thatcher, après un bras de fer d’un an entre le Premier ministre et les mineurs en grève.


Voir aussi :

http://berlemon.net/ressources_gb/m...

Libertés et devoirs syndicaux de Thatcher à Blair
Intervention au colloque "Liberté, libertés" à l’Université de Tours en septembre 2001

John Mullen Université de Paris 12 Créteil

La mention suivante est obligatoire sur les bulletins de consultation à partir de 1988 :

"If you take part in a strike or other industrial action, you may be in breach of your contract of employment."


Retour en haut de la page

Soutenir Mille Bâbords

Pour garder son indépendance, Mille Bâbords ne demande pas de subventions. Pour équilibrer le budget, la solution pérenne serait d’augmenter le nombre d’adhésions ou de dons réguliers.
Contactez-nous !

Thèmes liés à l'article

Histoire c'est aussi ...

0 | 5 | 10 | 15 | 20 | 25 | 30 | 35 | 40 | ... | 235